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Elvire, hyperféministe engagée sur tous les fronts

Dernière mise à jour : 23 mai 2021


Par Astrid Poullain, Julien Renard, Juliette Pichon



« Il y a mille et une manières de s'engager, il faut juste trouver celle qui nous convient », encourage Elvire Duvelle-Charles. La militante féministe de 33 ans est sur tous les fronts. Réalisatrice, écrivaine et journaliste, l’ancienne FEMEN veut « lutter contre tous les systèmes de domination ».


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Elvire Duvelle-Charles/ Crédit: @elviredcharles (Instagram)

« Je pense que j’ai toujours été féministe. » C’est la première phrase que prononce Elvire lors de cette interview vidéo, avec une attitude à la fois décontractée et déterminée. L’ancienne Femen, militante pour le plaisir féminin et la libération de la parole des femmes joue sur tous les tableaux. Et avec toutes les casquettes : réalisatrice, écrivaine et journaliste. Comme elle l’explique dans son Manuel d’activisme féministe paru en 2020, Elvire souhaite promouvoir un féminisme pour tous : « Il est important que les femmes s’emparent de tous les sujets pour faire vivre nos idéaux féministes: les luttes contre le racisme, le validisme, la grossophobie, la lesbophobie, la transphobie, les écocides, le capitalisme ».




Le compte Instagram Clit Revolution

En 2017, elle crée le compte Instagram Clit Revolution afin de « fédérer une communauté » autour de sa série documentaire éponyme. « A l’époque, sur Instagram, il n’y avait pas autant de comptes militants. C’était surtout des comptes privés où on partageait nos photos de vacances », se souvient l’activiste. Pourtant, c’est bien ce compte Instagram aux plus de 120 000 abonnés qui fait sa renommée aujourd’hui. Elvire a imaginé un espace où les femmes peuvent se rassembler et interagir sur les thèmes abordés par sa série sur FranceTv Slash. Ainsi qu’en montrer les coulisses. La série réalisée avec Sarah Constantin en 9 épisodes courts dénonce le patriarcat en partant à la rencontre « d’héroïnes qui défient les normes et se réapproprient leur sexualité ».


Une fois la série terminée, le projet de l’hyperféministe s’est exclusivement poursuivi sur ce compte où elle y partage ses lectures, interviews des activistes en live et brise les tabous du plaisir féminin. « Le compte m’a beaucoup portée, il m’a donné des opportunités de travail, de la légitimité », explique la militante qui se sent « très reconnaissante » vis à vis de ses abonnés. C’est la raison pour laquelle, malgré son nombre important d’abonnés, Elvire tient à répondre à tous ses messages reçus car selon elle « ça fait partie du contrat ».




Du féminisme extrême au dialogue

En 2012, Elvire rejoint le mouvement FEMEN France. « Le moment où j'ai commencé à être féministe ou en tout cas quand ça s'est activé c'est en rejoignant femen, je suis rentrée par l'activisme, je ne me suis pas intéressée à la théorie avant ». Elle devient alors directement, une militante féministe très active, avec une véritable volonté de faire passer des messages à travers des actes forts qu’elle définit comme étant des performances. Même s’il existe plusieurs manières de militer, pour Elvire, c’est « complètement une performance ». Elle explique que « c’est une mise en scène impressionnante qui va faire qu’on va parler de toi ». Ce qui motive l’activiste, c’est de « préparer une action pendant plusieurs semaines pour pouvoir enfin la réaliser ». Elle dit que depuis ses débuts, ses idées n’ont pas changé, mais évolué : « les prises de conscience se sont faites progressivement. Généralement par la rencontre avec une personne ou par une intervention médiatique qui me faisait réfléchir ».



L’un de ses plus beaux souvenirs est une manifestation réalisée au Chili avec un groupe de femmes portant toutes une queue de cheval dans le but de dénoncer les inégalités sexistes en Amérique Latine. Un épisode dans sa série ClitRévolution y est consacré.

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Manifestation au Chili / Crédit : @elviredcharles

D’après Elvire, la définition du féminisme évolue de jour en jour. Aujourd’hui, ce serait une lutte contre tous les systèmes de domination plutôt qu’une lutte pour les droits de la femme seulement. « Je ne comprends pas pourquoi les mecs continuent de se complaire dans la virilité, c’est un truc qui me dépasse, je comprends que ça aille avec un privilège de dominance, mais ça doit être chiant au bout d’un moment d’écraser tout le monde », exprime la militante d’un air désabusé.


Elvire a quitté les Femen afin d’être plus dans le dialogue et avoue avoir déjà fait l’expérience du burn out militant. Elle qui pourtant avait l’habitude de réaliser des actions fortes, comme en 2015 lorsqu’elle a couru seins nus sur la voiture de DSK, admet parfois « être déprimée au point de ne pas pouvoir aller manifester ». « La dernière fois que je me suis sentie vraiment mal c'est lorsque Darmanin a été nommé ministre, j'étais abattue ». Elle a appris à se protéger mais admet que sur les réseaux sociaux, il est plus difficile de s’en sortir car ces derniers sont très addictifs et chronophages : « je me suis rendue compte que je commençais à expérimenter des troubles de l'attention de manière exagérée, genre j'arrive dans ma cuisine et je sais plus ce que je suis venue y faire ». Malheureusement, comme sur tous les réseaux sociaux, la haine peut parfois être monnaie courante. Dans le cas d’Elvire, cette dernière prend la décision de bloquer les haters. « J'ai arrêté de dépenser de l'énergie à convaincre des personnes qui ne sont pas d'accord avec moi » confie-t-elle. Après s’être battue férocement pendant ses années Femen, elle se protège désormais en évitant les débats stériles. Préférant le dialogue et la pédagogie à l’action pure et dure.




L’entraide

En ce qui concerne la sororité dans le milieu féministe, Elvire évoque le fait que sur les réseaux sociaux il puisse quelque fois y avoir des attaques entre féministes : « j'ai beaucoup plus de problèmes avec d'autres féministes sur ce que j’aurais pu dire ou poster sur mes réseaux » avoue l’activiste. En revanche, la base même du féminisme selon Elvire, est la coalition entre les femmes, qu’elles soient cisgenres ou non. Ce sont ces arguments qui reviennent assez souvent dans son Manuel d’activisme féministe qu’elle a publié en 2020 avec son amie Sarah Constantin.

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Manuel d’activisme féministe

On peut y lire : « La sororité ne doit pas être qu’un mot jeté en l’air, elle doit se traduire en acte quotidien ». Ou bien encore: « Les hommes s’aident et se cooptent les uns les autres, de la maternelle jusqu’à la fin de leur vie. Pensez que si vous tendez votre main à une femme, une autre vous la tendra en retour ».


La militante de 33 ans applique elle-même ces principes en soutenant les projets de ses amies et des femmes qui l’entourent. Alice Dès, illustratrice et amie d’Elvire la décrit comme étant « une femme très dynamique, très drôle et enthousiaste. C'est une personne très inspirante et qui vous entraîne dans son énergie ! ». Elle indique que « travailler avec Elvire a changé [sa] vision de la société et du féminisme », elle a « beaucoup appris avec Clit Revolution » et a pu bénéficier du soutien de celle-ci : « elle m'a soutenue, encouragée, coachée même parfois sur l'utilisation des réseaux sociaux ».



Celle qui est décrite comme « une humaine géniale » par son amie Roxane Nonque, gérante du compte @dearlobbies, ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Elle prépare en ce moment une brochure d’éducation sexuelle en collaboration avec l’université de Genève et ZEP, le dessinateur de Titeuf. Elvire a aussi d’autres projets en cours mais dont elle « ne peut pas encore parler » a-t-elle dit mystérieusement.


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